Rencontre avec Nitsa Meletopoulos

C’est dur de donner une date de commencement... Je pense que j’ai appris à jouer avec la terre quand ma mère arrosait le jardin et me laissait me rouler toute nue dans la boue des rigoles ! Ensuite j’ai découvert la céramique avec mon père qui faisait une très belle terre vernissée provençale, j’adorais être dans son atelier. Mais ce n’est devenu un travail que bien plus tard quand, pendant une résidence de recherche à Leipzig, j’ai fait un projet en céramique. Je n’ai plus pu m’arrêter ensuite...

Tu mixes des techniques comme la 3D, l’assemblage, le modelage... mais presque exclusivement avec la terre, qu’est ce qui te plaît particulièrement avec ce médium ?

Travailler la terre et le feu, c’est jouer à la création des pierres tout en faisant de la dinette. Mélanger la boue et le verre pour créer des formes presque éternelles. C’est travailler dans un rapport au temps très particulier aussi, rythmé, avec des temps de pose qui forcent la patience. J’aime être dominée par elle, parce qu’elle amène toujours du nouveau. Et puis toutes ces techniques sont très riches esthétiquement et historiquement, les confronter m’intéresse.

Dans ton univers on perçoit des éléments très minéraux, de l’architecture, des références pop aussi, peut-être des voyages... Tu peux nous en dire plus ?

Je m’inspire de références très diverses oui. Je suis intéressée par l’idée de Maximalisme et des mouvements comme Art and Pattern ainsi que de styles très accumulatifs comme les Grotesques et le style Rocaille. S’ajoute à cela des références populaires et un goût pour le décor, le faux. Assembler ces univers m’amuse beaucoup et fait sens pour moi.

Collectionnes – tu des objets / œuvres ? Peux-tu me parler d’un (e) céramiste que tu apprécies particulièrement ?

Oui bien sûr ! Je collectionne les cailloux déjà, une bonne partie sert à créer mes pièces. Et diverses formes de la nature, bois, coquillages, champignons, particulièrement ceux qui sont partis un peu de travers dans leur développement. J’adore les gravats aussi et leur imperfection entre le cassé et le construit. Et puis la céramique évidemment que j’achète et troque à chaque évènement.

Si je dois choisir aujourd’hui une céramiste que j’apprécie, je dirais Betty Woodman. Son travail est une merveille dans les formes et les couleurs. Elle est vraiment un exemple pour moi, dans sa capacité à avoir fusionné poterie et sculpture, profusion et simplicité, objet et espace et puis dans sa carrière même, elle est incroyable...

Quelle est ton approche de la forme ? Est-ce qu’il y a beaucoup de recherche préliminaire et de tests ou alors c’est très spontané ?

Comment dire ... les trois à la fois : spontané, avec beaucoup de tests et de recherches préliminaires ! Je fais des croquis très rapides ou bien j’écris quelques idées de confrontation de matières, ou de formes. Je fais énormément de tuiles de recherche d’émail. Mais ensuite quand je suis là avec la terre ou les couleurs ça devient hyper spontané. Je crois beaucoup en l’intelligence de la main, elles savent plus que moi c’est sûr.

Quels sont tes projets en ce moment ? 

J'ai pas mal de projets pour cet automne, notamment mon premier solo show qui aura lieu en Allemagne au mois de Novembre et ensuite un duo show avec Victor Alarçon début 2022. Donc beaucoup de boulot en perspective ! Par la suite je pense que je prendrai un peu de temps à l'atelier pour laisser émerger de nouvelles choses et travailler en plus grandes dimensions.

Peux-tu nous parler des pièces sélectionnées pour Volume 3 ?

A little bit like Toutankhamon est une série de vases en porcelaine inspirés des vases en Albâtre de la tombe de Toutankhamon. Gauchement copiés, colorés, ils ondulent entre pièces design et pièces détachées de jeu de plateau. Les vases sont tournés en porcelaine et ornés d'anses encadrantes en porcelaine papier.

Blowing spore a été cueilli dans la forêt. Il se courbe doucement pour chuchoter ses mucilages. Ce vase est un assemblage de formes en porcelaine coulée, émaillé comme un dégradé de mousse.

Bruises est femme, mi-choux mi-fleur elle se pare des atours du luxe sans cacher les bleus et fissures de sa vie de feu. Bruises est un vase réalisé avec les résidus de mes pièces de coulage sur une base tournée en porcelaine. Une troisième cuisson or vient parfaire sa parure. 

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