Rencontre avec Clara Armanet
Parle-nous un peu de ton parcours, qu’est-ce qui t’a menée vers la terre ?
Je me souviens, quand j’habitais rue sainte Marthe à Paris, une potière avait son atelier en face de chez moi. J’étais très curieuse d’y jeter des coups d’oeil. Plus tard, j’ai pu observer la mère d’une amie chez qui j’ai passé beaucoup de temps, Charlotte Petit, pratiquer la céramique. Elle sculpte des bustes et personnages qui racontent des histoires. Le matériau m’a tout de suite plu. Être en contact direct avec la terre, pouvoir recommencer éternellement et l’infinité des possibilités qu’elle offre.
J’ai commencé en tant qu'artisan bijoutière à Londres. En rentrant à Paris dans mon tout petit appartement, j’ai ébauché quelques pièces sur un mini-tour. C’est en débutant une formation au CNIFOP à Saint-Amand-En-Puisaye en 2021 que je m’y suis réellement consacrée. Depuis, je me suis installée dans la région.
En quoi le fait d’être basée en Puisaye a une incidence sur ton travail ?
Être en Puisaye, c’est être entourée de céramistes, potier.es, technicien.nes de la céramique. C’est un apprentissage et des découvertes constantes. Mais c’est aussi une proximité avec les matières que j’utilise. J’ai la chance de pouvoir travailler avec le grès, l’ocre et les cendres des arbres locaux.
J’ai pu y rencontrer des ami.es, mais aussi des collègues, avec lesquels nous travaillons en collectif sur des cuissons, constructions de fours… dans l’objectif de développer un peu plus la cuisson au bois aux alentours de Saint-Amand. Ce qui est enrichissant, ce sont nos différentes approches de la terre. Elles nous permettent d’échanger sur nos pratiques, et d’évoluer collectivement.
D’ailleurs, j’ai tout récemment installé mon nouvel atelier partagé dans le centre du village !
Peux-tu nous en dire plus à propos des pièces que tu as créées pour Volume Ceramics ?
J’ai monté ces 3 pièces au colombin, que j’ai ensuite pincés, pour y laisser la trace de mes doigts et créer une trame. Ce sont des formes inspirées de jarres japonaises, ou je travaille l’harmonie et l’équilibre des courbes. Je me concentre sur des effets de matières que la trace du modelage peut révéler. Ils ont été cuits au bois dans un four couché à La Borne lors des Grands Feux 2024. La flamme, les cendres, et effets de braises viennent se poser sur une surface qui, de par ses mouvements est altéré. C’est alors que la trame se révèle..
Est-ce que tu écoutes de la musique / des podcasts à ton atelier, tu nous partages ta playlist ?
Si ce n’est pas la radio, voila quelques uns des titres que j’ai le plus écoutés cette année :
Reckoner - Radiohead
La Fama - Rosalia
Sans issue - mademoiselle Lou ft kyana
Avec classe - Aya Nakamura ft corneille
Opera - Bellboy
Todo homem - zeca veloso ft caetano veloso & Moreno veloso
Henny me noie - hamza
Vibes - hamza
Comment vois-tu ta pratique évoluer ?
Mes tous premiers essais étaient des mini pots sur le « mini-tour » dont j’ai parlé précédemment. Ils faisaient à peine 2-3cm de haut. J’étais surtout intriguée par la transformation d’une terre et de son émail.
Aujourd’hui, j’adore travailler l’utilitaire en utilisant la technique du pincé. J’aime l’idée de ne pas avoir besoin d’autres outils que mes mains pour modeler des pièces.
Je passe aussi beaucoup de temps à cuisiner. Désormais présenter des repas dans de la belle vaisselle est un plaisir. Je pense que cette pratique restera centrale à ma production.
Je produis de plus grosses pièces ornementales. J’y passe plus de temps ; réfléchir à la forme, aux ajouts de matières, et au mode de cuisson. Je suis confrontée à des contraintes différentes, et parfois des échecs qui me permettent d’avancer. Ce sont des pièces uniques. Il n’y a pas de série, plus de liberté et de surprises.