Rencontre avec Camille Romagnani
- Tu as étudié le textile à l’ENSCI Les Ateliers, qu’est-ce qui t’a menée vers la terre ?
Avant même de commencer mes études, mon objectif ultime en devenant designer était de collaborer avec des artisans. Je n’imaginais pas créer moi-même des objets. À mon arrivée en Grèce une fois diplômée, j’ai commencé à travailler la terre. Je n’ai jamais arrêté depuis. La pratique de la céramique regroupe tout ce qui m’intéresse : la technique, la forme, la couleur, la matière, le dessin. Cela me permet d’être entièrement indépendante dans ce que je produis, et d’alterner librement entre objets fonctionnels et sculpturaux.
- Peux-tu nous parler de ton processus créatif et des techniques que tu utilises ?
Je démarre d’une idée simple, comme la couleur du ciel, la forme d’une branche, d’un rocher ou encore la sonorité d’un mot. Les mots sont une vraie source d’inspiration. J’aime jouer avec eux, comparer leurs traductions en anglais, en français, en grec et en chinois, observer le graphisme et l’étymologie de chacune des langues. Par exemple, j’ai démarré ma série sur les montagnes en 2019 parce que la rue où je vis à Athènes peut se traduire par « les montagnes sacrées ».
Une fois que j’ai une idée, je sculpte à la main, deux ou trois pièces d’une même série à la fois. Chaque pièce en cours reste sur la table pendant plusieurs jours ou même plusieurs semaines. Je démarre généralement avec la technique du colombin. Puis j’expérimente avec différents outils pour sculpter, gratter, ajouter, graver, dessiner, émailler… J’apprécie la faïence pour travailler des couleurs vives, j’aime aussi travailler la porcelaine et le grès.
- D'où vient ton inspiration ?
De l’extérieur. Surtout lorsque je marche dans la nature, ou lorsque je cours dans les parcs. La vie évolue constamment. La couleur du ciel change, les plantes poussent, les animaux évoluent et interagissent. C’est toujours très beau.
Vivant en Grèce, les îles et la campagne environnantes sont d’une beauté étonnante et des sources constantes d’inspiration.
J’aime aussi jardiner, sur mon balcon à Athènes ou dans le jardin de ma grand-mère à la campagne, en France.
- Est-ce que tu penses que le fait de vivre à Athènes impacte ta pratique ?
Athènes me permet d’expérimenter et de trouver mes propres moyens d’expression artistique. J’y ai plus d’espace et davantage de temps qu’à Paris. J’y ai aussi rencontré de nouveaux amis, d’âges variés et de toutes origines ; leurs trajectoires personnelles et professionnelles me nourrissent énormément. Le lien à la nature est également plus intense ici, la mer et les montagnes sont si belles et si proche de la ville. La nourriture est délicieuse également, ce qui doit nourrir ma créativité j’en suis sûre !
- Peux-tu nous en dire plus à propos des pièces créées pour Volume Ceramics ?
Elles sont dans la continuité de mon processus créatif : j’ai commencé à travailler la céramique en lien avec la montagne et le volcan. J’ai ensuite eu envie de connecter mon travail en céramique à une autre facette de ma pratique de dessin et de textile, développée pendant l’ENSCI, les couleurs du ciel. J’ai ensuite eu envie de mêler la montagne et le ciel dans mon travail.
- Est-ce que tu écoutes de la musique en travaillant ? Partage-nous ta playlist !
J’écoute énormément de podcasts à l’atelier. Ils me permettent une évasion de l’esprit, alors que la musique est plutôt une expérience liée au corps et à l’esprit. C’est difficile pour moi d’écouter de la musique en faisant de la céramique parce que je sens que mon corps n’est pas à 100% orienté vers la sculpture.
Que ce soit pour la musique ou les podcasts, j’écoute beaucoup les radios de Radio France. Nous avons tellement de chance d’avoir une radio de cette qualité, des découvertes musicales aux podcasts sur la science, les arts, l’histoire ou les documentaires. J’apprends tous les jours.
- Comment vois-tu ta pratique évoluer à présent ?
En céramique, j’ai envie de passer à de plus grandes échelles et de trouver un équilibre entre utilitaire et sculptural. J’ai toujours soif d’apprendre de Nouvelles techniques et de nouveaux artisanats, comme le travail du métal, du bois ou encore le verre soufflé. J’aimerais beaucoup collaborer avec différents artisans, artistes, dans des lieux différents.
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crédits photos : Nicolas Melemis @melemis